EFFONDREMENT SILENCIEUX ET VULNERABILITE STRUCTURELLE AU MALI (1990–2024) : Analyse économétrique et discursive des liens entre chômage, désétatisation et pauvreté durable

Abstract

Cet article analyse, sur la période 1990–2024, les liens entre chômage structurel, retrait progressif de l’État et reproduction durable de la pauvreté au Mali. À partir de données annuelles issues de bases internationales (WDI, ILOSTAT, UNESCO, BTI, WGI), l’étude mobilise un modèle ARDL, un VAR et des tests de ruptures structurelles, complétés par une analyse qualitative thématique des discours institutionnels post-2020. Les résultats montrent que la pauvreté demeure fortement inertielle, peu sensible aux leviers traditionnels que sont le capital humain, l’emploi formel ou la croissance, tandis que la dépense publique reste largement réactive et concentrée sur des réponses ex post. L’analyse discursive révèle la substitution de la performance institutionnelle par une souveraineté performative, utilisée pour légitimer un retrait fonctionnel de l’État et justifier la fragmentation territoriale des politiques sociales. L’article propose le concept d’« effondrement silencieux » pour qualifier un régime d’érosion institutionnelle diffuse et narrativement construite. Sur le plan opérationnel, il suggère une réorientation des politiques publiques autour de trois priorités : recentrer l’éducation sur les apprentissages mesurables et l’employabilité locale, territorialiser les services sociaux de base à travers des cercles pilotes hors de Bamako, et renforcer la règle de composition budgétaire pour garantir une allocation plus équitable. En ce sens, l’étude contribue à une économie politique critique de la pauvreté et de la fragilité étatique en contexte postcolonial, tout en fournissant des repères pratiques pour les décideurs.